Guerre des nerfs en Italie !

Ou à quoi ça ressemble un Championnat d’Europe de Double Mixte en Italie ?

Nastro Rosa Tour 2021

Partie 1 = Championnat d’Europe = 3 étapes sur la côte ouest

Le team est composé de :
Skippers : Jonas GERCKENS et moi-même
Coach : Benoit CHARON
Météorologue : Christian DUMARD
Médias : Delphine SIMON et Arnaud SALMON

Pour préparer cet Européen, nous avons eu 3 jours avec le Team pour mettre en marche Cataldo, notre Figaro Bénéteau 3 flambant neuf qui comme ses 9 voisins compose cette nouvelle flotte monotype. Equipés légèrement différemment des bateaux de la Classe Figaro, nous connaissons un peu le bateau et travaillons vite et efficacement accompagnés du coach/préparateur/médiaman Benoit CHARON.

Tableau de match :

Leg 1 : Coefficient 1 Gênes -> Civitaveccia

Sur ce premier Leg, nous terminons seconds. Nous prenons un départ correct, et après un bord de près très court et moyennement mené, nous envoyons le spi pour une longue descente vers Civitavecchia (port proche de Rome). Globalement, le vent n’est pas très soutenu (15 nœuds maxi) et à chaque transition diurne/nocturne nous traversons des zones de calme de deux heures.

Si le mécanisme paraît simple sur le papier, sa gestion est un peu plus compliquée notamment de nuit, où l’on ne peut pas observer le plan d’eau. Pour nous faciliter la vie, nous avons le droit de télécharger les fichiers dès que nous avons du réseau, généralement cela nous donne une bonne idée d’où rentrera le nouveau vent et permet d’orienter nos placements stratégiques. Jusqu’ici, nous nous en sortions plutôt bien puisque nous terminons second sur cette étape.

En conclusion, nous sommes confiants sur notre vitesse, mais nos adversaires directs connaissent encore mieux le bateau et sont italiens… Nous sommes conscients qu’ils vont nous donner du fil à retordre. Et sinon, c’est toujours aussi joli !

Etape 2 : Coefficient 1 : Civitavecchia -> Naples

L’image de cette étape restera notre super départ bâbord ! Nous avons gardé la tête de flotte un petit moment jusqu’à la première nuit. Nous avons cédé du terrain à Alberto et Cecilia qui se sont engouffrés dans la brèche, ce qui nous a valu une petite course de vitesse de nuit bien sympathique. Elle l’aurait été encore plus si nous avions su les contenir mais non… Ils sont passés devant et y sont restés ! « Même joueur joue encore »

Sur cette étape, la flotte était beaucoup plus éclatée que sur la précédente. De quoi nous inquiéter un peu plus à chaque arrêt. Cette inquiétude était fondée puisque sur le dernier petit matin, c’est l’autre équipe italienne qui a déboulé en rasant la côte pour garder un fond de vent, leur permettant de nous recoller et même de nous doubler. En bataillant dans presque rien, nous avons réussi à repasser mais pas pour longtemps malheureusement… Nous reperdons notre seconde place au prix d’un placement hasardeux.

Nous voici donc au pied du mur. Il va falloir donner beaucoup et encore plus sur la dernière étape coefficient 1,5. Si la première place s’est bien éloignée, (pour l’atteindre, il faudrait intercaler deux adversaires entre nous et les premiers) nous sommes conscients qu’il va falloir jouer plus finement pour rester devant le paquet qui se bas derrière pour la troisième place voire plus.

Final leg : Coefficient 1,5 : Naples -> Naples ou la guerre des nerfs

Avant de partir, on sait déjà que l’on va trimer comme des dingues et que il y aura beaucoup de regroupements malgré nous selon notre météorologue Christian DUMARD. En gros, à chaque transition les premiers butteront dans des phases sans vent permettant aux poursuivants de réattaquer par derrière… sans compter les effets de déviation du vent ou de tampon/accélération quand on fait le tour d’îles hautes de plusieurs centaines de mètres… ça promet !

Nous partons donc lundi… ah non mardi finalement suite à un changement de programme de dernière minute au matin. Le parcours est plus proche d’un slalom côtier que d’une course au large :

Naples -> tour de Capri -> tour de Palmerola -> Gaeta -> passage dans le chenal entre Ischia et Procida -> tour de Capri -> tour de Ventotene -> repassage dans le chenal -> et re-re tour de Capri si l’orga ne décide pas de raccourcir en fonction du timing !

Départ moyen, envoi de spi nickel, nous tricotons super bien vers Capri, prenons la tête de flotte pour accueillir le vent thermique qui nous amène tranquillement vers Capri. Une fois n’est pas coutume, nous sommes talonnés par Alberto et Cecilia. Nous sommes de jour, le vent n’est pas très fort et nous savons que Capri va nous jouer des tours. Je décide d’y aller sur le visuel, ça avait bien marché lors de l’étape précédente, je glisse un peu plus que les italiens, eux montent se coller aux falaises et pendant des dizaines de minutes, les distances feront l’élastique, un coup pour eux un coup pour nous. Les anglais qui font cavaliers seuls à la côté depuis le début passent comme des fleurs loin du dévent de l’île mais se retrouvent avec énormément de chemin à parcourir. Derrière, nos adversaires bien malins évitent de se retrouver dans les mêmes zones compliquées que nous. Ils sont nombreux à raser la côte et c’est là-bas que ça passe. L’opération nous a coûté cher, mais ce n’est que le début alors on efface et on se remet en selle. Ca part de là !

Une fois le vent revenu, nous tricotons sous Capri, nous recollons au paquet de tête composé de 5 bateaux, nous nous positionnons dessous afin de bénéficier de la prochaine bascule de vent. Sur notre route se trouve Ischia, une montagne au bout de la baie de Naple qui nous apportera à tous des lifts incroyables. Nous la jouons modérés et ça paye, nous gagnons une place.

Le long bord vers Palmerola sera une course de vitesse qui nous réussi puisque nous reprenons la tête. Le stress monte puisque nous passerons cette île de nuit et que nous craignons les effets de site. Nous suivons aveuglément les fichiers de vent et ça ne rate pas, nous nous arrêtons. Rebelote, les poursuivants évitent de nouveau notre zone et nous contournent sans difficulté… Ca commence à bien faire. L’opération nous coûte 2 ou 3 places. Ca repart de là direction la côte et la bouée de Gaeta.

Ici s’annonce la transition la plus longue et la plus compliquée. Nous nous plaçons au large de nos adversaires pensant récupérer le thermique en premier, les suivants vont encore plus au large, arrêt buffet pour toute la flotte sauf les suédois qui s’envolent et nous colle 8 milles d’avance à tous pendant que nous restons scotchés plusieurs heures. Pire encore, ça avance au-dessus et au-dessous, là les nerfs commencent à fissurer légèrement, on trépigne, on s’arrache les cheveux, on souffle un coup et on attend. C’est dur, vraiment très dur à gérer.

On repart enfin, là il y a du boulot pour rattraper la tête. Heureusement, à Gaeta nous envoyons les spis, le vent monte jusqu’à 17-18 nœuds sur mer plate, nous faisons parler les foils, ça glisse, c’est enfin fun et agréable. Direction Capri, plein vent arrière, nous jouons les bascules plutôt finement et nous remontons à la quatrième place. Au loin les nuages montent, la nuit tombe et l’orage éclate juste devant nous au moment d’enrouler Capri. Le vent tourne, arrive en rafales, nous changeons de voiles en catastrophes, effectuons deux micros bord pour réussir à passer la pointe de l’île et préparons le grand spi pour une descente de nuit sous l’orage dans 20-25 nœuds de vent bien rafaleux.

Sur le papier, ça aurait du être le moment le plus fun de toute la régate. Ca a été un véritable enfer. Sur 3 gybes, pas un seul ne passe. Et le premier remporte la palme. Au moment de passer le spi, le génois s’est lâché, est parti devant et s’est enroulé avec le spi autour de l’étai… Le plan le plus galère possible !

On bataille ferme, on lance ce qui nous reste d’énergie pour essayer de démêler tout ça, ça donne envie d’hurler parce que lo’n sait que pendant ce temps-là les autres ne nous attendent pas. Bref, nous finissons par arriver à tout affaler, nous démêlons, regréons et renvoyons le spi et le génois sur l’autre bord. Gybe suivant, les deux points bas du spi se bloquent, cocotte, rebelote. On affale avant que ça dégénère de nouveau, on démêle, on regrée et on renvoie. Autour de nous, c’est aussi le chaos chez nos adversaires, la plupart n’ont pas envoyé le grand spi et navigue sous gennaker plus lentement en moyenne. Bien énervés, nous attaquons une fois sur le bon bord et regagnons la seconde place en creusant derrière. Arrivés à Ventotene, nous retrouvons les premiers qui ne sont plus très loin devant alors on se concentre pour tactiquer à l’endroit et réduire les écarts.

Et ça marche, nous sommes conscients que nos cerveaux ne sont pas prêts à encaisser d’autres échecs. A Ischia nous rattrapons les premiers empêtrés dans les dévents de l’île (chacun son tour finalement !) et nous reprenons in extremis la tête de flotte. A partir de là, c’est un coup toi un coup moi, nous passons le chenal devant et là, nos gentils concurrents nous annoncent qu’il faut aller directement à l’arrivée et non pas à Capri comme nous étions en train de le faire. L’organisation a communiqué l’information par téléphone soi disant mais nous ne l’avons jamais reçue ! Coup de stress, on appelle le Comité qui nous confirme l’information, le temps de nous remettre en ordre de marche, nous avons perdu des longueurs évidemment et surtout nous ne sommes plus dans les mêmes effets que nos poursuivants !

Nous repartons au près, il reste 10 milles à parcourir au petit matin dans un vent faiblard. Nous matchons leurs virements, mais ils vont toujours un poil plus vite et les écarts se réduisent comme peau de chagrin. Le vent tombe, ils reprennent le lead, la course se poursuit laborieusement à 2 nœuds, nous reprenons l’avantage sur un placement avant que la pétole ne s’installe définitivement. Nous sommes bons pour attendre au moins une heure que le vent thermique se crée et vienne nous pousser jusqu’à l’arrivée. Nous nous sommes placés pensant qu’il allait rentrer par le sud, manque de pot, c’est par le nord. Ce sont donc Alberto et Cecilia qui repartirons en premiers et gagneront l’étape 9 minutes devant nous. C’est finalement le plus petit écart avec nos concurrents sur les 3 manches, preuve que nous avons franchement progressé sur la marche du bateau pendant tout ce championnat. On peut enfin crier un bon coup, faire table-rase des gros moments de tension et faire sortir le trop plein de frustrations, quel soulagement !

Nous voici donc avec notre 3ème médaille d’argent consécutive sur les 3 championnats d’Europe de course au large en double mixte !

Remerciements

Un grand merci à la Team qui nous accompagne de près ou de loin :

Jonas tout d’abord bien sûr qui continue de me supporter (mais pour combien de temps encore ?)

Le coach : Benoit CHARON

Le météorologue : Christian DUMARD

La manager : Delphine SIMON et son photographe/vidéaste/conseiller Tripadvisor : Arnaud SALMON

Le coach physique : Stéphane ELIOT

Le préparateur mental : Nicolas MEUUS

Les team qui nous ont accueillis et nous ont prodigué leurs bons conseils : le Team Vendée Formation et Lorient Grand Large renforcé par Tanguy LEGLATIN

A tous les figaristes qui nous ont prodigué des conseils tout au long de l’année, et à Alberto BONA et Cecilia ZORZI qui nous ont servi de lièvres pendant toute cette course, grâce à eux nous avons fait de gros progrès sur le bateau !

Un immense merci à nos partenaires sans qui nous ne serions évidemment pas là :

Adeps – Officiel Volvo Car BeLux Galler Fédération Francophone du Yachting Belge Beobank Belgique Julbo Helly Hansen Fame Us Simple CRM SNEH asbl community Garmin EUROSAF Great Circle – Squid SNEH Club de voile, Plate Taille, Belgique Nastro Rosa Tour Garmin

Next step : le Championnat du monde de course au large en double mixte

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